artistes en résidence
nechama levendel, plasticienne
photo © Yossi Waxman
Je suis née en 1961 en Israël d'une mère religieuse juive yéménite et d'un père athée belge, survivant de l'holocauste. Mes grands-parents étaient originaires du Yemen, de Hongrie et Transylvanie. Mes parents ont tous deux émigré en Israël en 1948 - 1950.Influencée par mon père, un pionnier par nature, une personne créative, un bon musicien, à la fois peintre et sculpteur dont l'holocauste a changé le parcours de vie, j'ai suivi son chemin artistique inachevé. Pendant des années, j'ai fait de l'art principalement de la peinture jusqu'à ce qu'un épisode marque et change toute mon observation et mon expression.
Durant l'hiver 2000 lors d'une résidence d'artiste à Düsseldorf en me promenant dans le marché aux puces, j'ai remarqué une pile de livres qui traînait le long de la route. Je ne savais pas grand-chose de leur contenu, mais en pensant à l'histoire locale, mon esprit ne pouvait ignorer la phrase de Heinrich Heine : "Là où ils brûlent des livres, ils brûleront finalement des êtres humains aussi" (1821). ("Dort, wo man Bücher verbrennt, verbrennt man am Ende auch Menschen.")
J'ai rassemblé les livres et les ai portés à mon atelier. Là j'ai créé mon premier livre-objet intitulé "xénophobie"- peur ou haine de ce qui est perçu comme étranger ou étrange - qui a ouvert la voie pour les vingt années suivantes à la création de peintures et de sculptures à partir de livres.
En raison de divers événements de la vie, notamment la perte soudaine de mon mari Nadav Bloch en 2011 qui m'a laissé sans âme et dans la douleur, ce n'est que trois ans plus tard alors que je tenais un livre de notre bibliothèque – un vieux livre déchiré d’occasion – dont une partie est tombée au sol, et où je me suis retrouvée seulement avec une couverture de livre tombant en morceaux dans ma main et des pages vierges – que je me suis sentie sans valeur, sans mots et vide. J’en ai ramassé les morceaux, les ai placés sur la table. D'au-dessus j'ai détecté une scène, une vue qui m'était inconnue. Cette émotion a été le tournant dans ma vie qui m’a remis au travail.
De vieux livres d'occasion me sont donnés par des bibliothèques privées et publiques. Le travail se fait à deux niveaux : en trois dimensions, créant des lieux de connaissances produites à partir du corps du livre et en deux dimensions, créant des images faites à partir de couvertures de livres déchirés, des première et dernière pages sans texte, utilisant le temps comme palette dans mon travail. J'ai trouvé la limitation matérielle gratifiante, n'utilisant rien d'autre que des livres et de la colle.
En 2014, les œuvres étaient exposées à Majorque sous le titre Re-over. Depuis, je travaille et j’apprends le Zimzum - le dogme de la rédaction.
(Note de la traductrice : Le Zimzun est un des enseignements du mysticisme juif.)
I was born in 1961 in Israel to a Yemeni Jewish religious mother and a Belgian atheist father, a survivor of the Holocaust. My grandparents were from Yemen, Hungary and Transylvania. My parents both emigrated to Israel in 1948-1950. Influenced by my father, a pioneer by nature, a creative person, a fine musician, both painter and sculptor whose life course was changed by the Holocaust, I followed his unaccomplished artistic way. For years I was doing art mainly painting until one episode scored and changed my entire observation and expression.
During the winter of 2000 during an artist residency in Düsseldorf while walking through the flea market, I noticed a pile of books lying along the road. I didn't know much of their contents, but thinking of local history, my mind couldn't ignore Heinrich Heine's phrase : "Where they burn books, they will, in the end, burn human beings too" (1821) . ("Dort, wo man Bücher verbrennt, verbrennt man am Ende auch Menschen.")
I gathered the books and carried them to the studio. There I created my first book-object entitled "xenophobia" - fear or hatred of what is perceived as foreign or strange - which paved the way for the next twenty years to come creating paintings and sculptures made out of books.
Due to various life events and after the sudden loss of my husband Nadav Bloch in 2011 which left me soulless and in sorrow, it was only three years later when I was holding a book from our library at home – an old, torn second-hand book – part of which fell down to the floor, I was left with a falling-apart book cover in my hand and blank pages - I felt worthless wordless & empty. I picked up the pieces, placed them on the table. From above I detected a scenery, observing it closely I sow an unfamiliar view. That emotion was the turning point which started me working again.
Used old books are donated to me by private and public libraries. The work is done on two levels: in three dimensions, creating halls of knowledge produced from the book contents, and in two dimensions, creating pictures made out of the torn book covers, first & last pages, no text on them, using time as pallet in my work. I found the material limitation rewarding by using nothing but books and glue.
In 2014, the works were exhibited in Mallorca under the title Re-over. Since then, I have been working and learning the Zimzum - the dogma of redaction.
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« Levendel a une profonde appréciation du livre et de sa signification complexe en tant que fondement de la culture, moyen central de diffusion des connaissances – en ce sens qu'il crée des liens, en tant que texte multidisciplinaire, de valeur philosophique et sacrée contenant la connaissance – et archives spirituelles humaines. Néanmoins, dans ses œuvres, elle nie cette fonction et ce sens originaux, et dépouille le livre de son intégrité physique et idéologique. Dans les œuvres de Levendel, le livre passe par la destruction – il est complètement démonté et déchiré. Finalement, il subit un processus de renouvellement – une fois encore, il est construit et assemblé. »
« Levendel has a deep appreciation of the book and its complex significance as a foundation of culture, a central means for spreading knowledge – bridging and connecting, as a multidisciplinary text-book of philosophical and sacred value containing knowledge – the human spiritual archive. Nevertheless, in her works she negates this original function and meaning, and strips the book of its physical and ideational wholeness. In Levendel's works the book passes through destruction – it is dismantled completely and torn up. Eventually, it undergoes a process of renewal – once again it is constructed and assembled. »
Dr Irit Miller
« Dans les dernières œuvres de Levendel, il ne reste rien du livre en tant qu’entité autonome. Les livres subissent une métamorphose et deviennent la matière première du processus créatif. L’artiste a déchiré les anciennes couvertures de livres avec un couteau tranchant, écrasant le carton et la reliure. À partir de là, elle a créé un collage de bandes de papier déchirées et moisies, de segments de couvertures de livres émiettées de différentes teintes ocres aux textures subtiles et riches, ce qui a donné des vues abstraites et étendues cachant leur source initiale – le livre. »
« In Levendel's last works nothing is left of the book as an autonomous entity. The books undergo a metamorphosis and become the raw material in the creative process. The artist tore through the old book covers with a sharp knife, crushing the cardboard and binding. From that she created a collage of torn and mouldy strips of papers, segments of crumbled book covers in varying ocher hues with subtle and rich textures, resulting in abstracted and expended vistas hiding their initial source – the book. »
Dr Irit Miller
Site internet : www.nechamalevendel.com
Email : levendelbloch@yahoo.com